Ce n'est pas tous les jours, ni même tous les ans, qu'un film originaire du Bhoutan trouve son chemin jusqu'à nos salles de cinéma. Rien de surprenant à cela : le pays, qui compte moins d'un million d'habitants, a connu une modernisation tardive, et n'a commencé à produire des longs-métrages qu'à partir des années 90.
Cette lente évolution du Bhoutan sert de toile de fond à la comédie dramatique Le Moine et le fusil, deuxième long-métrage de Pawo Choyning Dorji (L'école au bout du monde). Prenant place en 2006, le film témoigne dès ses premiers instants du décalage qui existe entre le Bhoutan et l'Occident : Internet vient à peine d'être installé, MTV et le groupe Dire Straits font figure de nouveautés musicales, James Bond est encore un sombre inconnu et la démocratie est encore inédite. Ce droit « pour lequel des personnes d'autres pays se sont entretuées », pour reprendre une réplique d'une des protagonistes, vient alors d'être donné, par la volonté du roi, à la population bhoutanaise...qui ne semble guère y tenir. Au point qu'une simulation d'élection est organisée, pour apprendre aux citoyens comment voter, mais aussi pour les motiver. Ce qui dans certaines nations relèverait du séisme politique semble être pour un bon nombre de Bouthananis une incongruité, et presque un inconvénient - donnant lieu à quelques répliques et situations plutôt amusantes. Pawo Choyning Dorji fait preuve à cet égard d'une certaine dérision quant à ses concitoyens, qu'il croque de façon gentiment moqueuse. (Adrien Corbeel)
A déguster ensemble dans la fraîcheur d’un cinéma.